Comment prendre mieux en charge, aux niveau national et communal, celles et ceux qui, pour une raison ou pour une autre, sont « loin de la culture » et qui ne partagent pas nos « codes » culturels, afin de développer, ensemble avec les concerné(e)s, des projets et programmes vraiment « inclusifs » ?
Des visites de théâtres ou de musées ne font pas partie de la vie quotidienne de tous les ménages. Certaines personnes ont par exemple des réserves face à une participation à un concert classique, parce qu’ils ne se sentent pas à leur place dans le monde de la musique classique, comme ils n’ont pas grandi avec. Afin d’éviter des peurs et méfiances il est donc important de mettre les enfants en contact avec la culture dès leur plus jeune âge en travaillant en étroite collaboration avec les écoles et les structures d’accueil.
En même temps, les offres culturelles doivent aussi être proposées dans des cadres non institutionnels, par exemple dans des lieux publics ou lors de festivals de rue. Lorsqu’on a juste assez d’argent pour joindre les deux bouts à la fin du mois, il n’est pas toujours facile d’avoir assez de budget pour participer à une activité culturelle. Même si des initiatives comme le Kulturpass donnent aux personnes à faible revenu accès à certains événements culturels, il faut garder à l’esprit que dans le contexte actuel de la hausse des prix de l’alimentation et de l’énergie, que les classes moyennes eux-aussi commencent à économiser sur les loisirs. Dans des lieux publics, il est plus facile pour un public large et diversifié d’entrer à bas seuil en contact avec la culture. Les gens peuvent y découvrir leurs intérêts (peut-être inconnus jusque-là) pour les offres culturelles. Toutefois, cela suppose également que ces offres soient proposées en plusieurs langues, si elles comportent des éléments linguistiques. Le Luxembourg compte de nombreux travailleurs frontaliers et une importante communauté d’expatriés. Afin d’éviter que quelques groupes sociaux ne bénéficient que peu de l’offre culturelle, il est donc aussi important de réduire les barrières linguistiques.
De plus l’État devrait encourager les communes à soutenir l’engagement culturel local en proposant des primes si une commune optait lors de célébrations publiques pour des artistes locaux et en offrant une plateforme d’échange digitale pour des activités de bénévolat à court terme dans le domaine culturel. Depuis un certain temps on observe que le nombre de bénévoles est en baisse ; En même temps on constate que beaucoup de gens sont prêt à aider ponctuellement à la suite d’appels sur les réseaux sociaux. Une plateforme digitale pour chaque commune où les artistes et créateurs locaux pourrait insérer leurs projets pour trouver des participants qui sont prêt à consacrer juste quelques heures pour faire avancer le projet, pourrait mettre en contact des personnes de tous horizons.
- Comment inverser le préjugé consistant à constater que certains publics ne s’intéressent pas à la culture en reconnaissant que la culture s’intéresse trop peu à ces publics, en particulier chez les travailleurs pauvres ou les populations marginalisées ?
Les pirates considèrent qu’il serait plus utile de se concentrer sur la création de lieux de rencontre pour les créateurs et les populations marginalisées que de « chercher un coupable ». Sans répondre à la question si certains publics s’intéressent trop peu à la culture ou si la culture ne s’intéresse trop peu à eux, le but devrait toujours être de les rapprocher en proposant des espaces d’échange et des cadres non institutionnels.
- Comment établir une « nouvelle gouvernance » entre l’État et les communes, d’une part, et la société civile d’autre part, et cela sur une base partenariale ?
La société et non l’État doit être au centre d’une politique culturelle réussie. La société doit fixer des thèmes. L’État et les communes ont pour tâche de soutenir ceux qui créent la culture et de garantir l’accès à la culture pour tous, en respectant une approche
« bottom up ».
- Le ministère de la Culture, en proposant/imposant, à toute une série de asbl, une
« charte de déontologie pour les structures culturelles » et en demandant la transformation de cinq d’entre elles (Casino-Forum d’Art contemporain ; Rotondes ; MUDAM ; TNL ; Trois-CL ; Maison pour la danse) en « établissement public », ne renforce-t-il pas trop une vision top-down de la politique culturelle, aux dépens de la diversité culturelle et des émergences artistiques d’une démarche bottom up ?
Et puis, est-ce qu’une démarche vraiment « orientée compétences » et responsable d’imposer par exemple quatre représentants d’un même ministère, seulement pour avoir une majorité au sein d’un CA, aux dépens des compétences existant parmi les artistes, les acteurs culturels et la société civile ? Pourquoi le ministère de la Culture ne s’est-il pas inspiré ici de la « bonne pratique » de la radio 100,7, certes aussi établissement public, mais avec une majorité – et une présidente – « société civile » au sein du CA ?
Pour une politique culturelle moderne et inclusive il est important de respecter une approche “ bottom up” au niveau du choix des projets et des contenus tout en gardant un certain pouvoir de décision au niveau des grands établissements dans des questions financières. Si une structure profite de capitaux publics dans un ordre de grandeur très important, il est indispensable que l’Etat veille aussi sur l’utilisation de ces investissements. D’autre part les communes et l’Etat peuvent laisser un maximum d’indépendance aux travailleurs culturels lors de petits projets et concernant les contenus/sujets des projets.
- Qu’en est-il de la « gouvernance culturelle » : au niveau national, entre l’Etat et les communes, dans les asbl (voir le projet de loi 6054 sur les asbl et fondations) et autres structures culturelles ?
Nous avons besoin d’une gouvernance culturelle qui permet au secteur de la culture de se développer de manière à permettre à chacun qui le souhaite de participer pleinement au monde culturel. Nous nécessitons des infrastructures appropriées pour les travailleurs culturels, des processus administratifs simples et destinés à favoriser un environnement culturel diversifié et inclusif et une législation autour de la propriété intellectuelle qui considère l’intérêt individuel aussi bien que commun.